Malcolm X


 

Malcolm X est né d’une rencontre et d’une amitié fortes avec Léonie Simaga et Karima El Kharraze. C’est la découverte de ce texte durant mes études au CNSAD qui m’a véritablement amené à la mise en scène. Je n’en avais jamais éprouvé le besoin auparavant mais il fallait que je porte cette parole d’une manière ou d’une autre. Le travail a nécessité beaucoup de discussions et de débats entre nous, même si nous étions finalement d’accord sur le fond du propos. Les comédiennes tentaient de me faire sentir ce que signifiait au quotidien être d’origine étrangère en France ou simplement ne pas avoir la même couleur de peau que la majorité des gens.
Pourquoi certains revendiquent leur identité française et pourquoi d’autres s’en sentent dépossédés ? L’identité et le sentiment d’appartenance à un groupe sont des notions complexes, difficiles à percevoir quand elles ne sont pas vécues de l’intérieur. Durant l’exploitation du spectacle au Théâtre-studio d’Alfortville du 20 au 31 mars 2007, des débats systématiques après les représentations nous ont enfin permis d’échanger nos réflexions avec les spectateurs confirmant ainsi notre pressentiment : ce texte est un formidable appel au dialogue.


Bryan POLACH

 

 

Très rapidement, la question de savoir si cela avait un sens de faire jouer à une femme le rôle d'un homme ne s'est plus posée. Et j'avoue ne même pas y avoir pensé, lorsque j'ai dit à Bryan, la première fois, que j'avais envie d'interpréter ce texte sous sa direction. Le travail commencé, dès que, maladroitement, je tentais de 'viriliser' ma voix, mes postures, dès qu'une violence artificielle intervenait, Bryan corrigeait : “il ne s'agit pas de jouer, d'interpréter Malcolm, Malcolm Little.... dis juste les mots, entends le rythme, dis les bien fort, bien distinctement, et entends ce que tu dis.... dis le aux gens qui sont là, parle moi, à moi....” Car ce travail à été d'abord théâtral, c'est à dire de langue, de souffle. Et la langue du tribun, fidèlement rapportée par M.Rouabhi, nous obligeait à cette exigence. Malcolm X est un penseur et un orateur brillant. L'acteur, l'actrice qui se mesure à son verbe doit s'y être préparé ! Et bien sûr, ensuite, tout de suite après, parvient le sens. Entendre cette parole m'a changée, radicalement. J'ai simplement vraiment compris, à 26 ans, que j'étais métisse, c'est-à-dire noire, pour moitié. J'ai compris, mon corps a compris tout ce qu'il portait, depuis des siècles, tout ce qu'il signifiait pour les autres, les “blancs” (que je suis aussi, en proportions égales mais, peu visibles !!). Une fois la douleur localisée, identifiée, acceptée enfin, peuvent intervenir la révolte, et la reconstruction.
Reconstruction de soi, du respect de soi. Amour de l'autre.
C'est ce à quoi aboutit la foudre que Malcolm X fait s'abattre sur la tête de ceux à qui il parle.

 

Léonie SIMAGA

 

Texte de Mohamed Rouabhi et Karima El Kharraze

Mise en scène de Bryan Polach

Avec Karima El Kharraze et Léonie Simaga de la Comédie Française

Création le 20 mars 2007 au Théâtre-Studio d'Alfortville